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Mots, et maux, émotions
22 juin 2006

Etrange destin (1)

Voici une nouvelle que j'ai ecrite il y a 4 ans. Vu sa longeur je suis obligée de la transcrire en plusieurs fois,  j'espere que les coupures ne generont pas la lecture.


Soudain le silence de la nuit fut brisé : des crissements de pneus, des pas précipités, des ordres qui fusaient. Dans la maison encerclée, la femme se résigna. Calmement, sans faire le moindre geste inutile, elle s’assit. Il ne servait plus à rien de se cacher, de tenter de fuir. Ils l’avaient rattrapé.

Elle réprima un sursaut lorsque la porte s’ouvrit avec violence, des hommes, armes à la main, entrèrent, braquant sur elle leurs torches. Aveuglée, la jeune femme mis la main devant ses yeux et attendit… Son destin était scellé.

Elle se tenait droite, fière, les mains posées sagement sur les genoux. Aucun mot ne furent échangés. Les hommes la maintenaient en joue, eux aussi dans l’attente. Une nouvelle voiture arriva, un ordre bref fut lancé. Les hommes se mirent au garde à vous, des pas résonnèrent dans l’allée. Une silhouette sombre pénétra dans la maison. L’homme, guindé dans son uniforme noir, jeta un rapide coup d’œil à la femme qui s’était levée à son arrivée. Sa voix résonna dans la nuit glacée :

«  A t’elle opposé une résistance ? »

Sur un signe de négation d’un de ses hommes, il se tourna alors vers elle. Son regard se fixa sur la jeune femme, parcourant d’un air indifférent ses courbes, ne s’attardant que quelques instants sur son visage, sans paraître en apprécier la beauté.

« Helena Saint Helme, Vous etes en état d’arrestation pour violation des articles SD256, QL45 et GT50P des Lois de l’Administration. »

Il se tourna alors vers un garde et lui fit signe d’emmener la jeune femme. Sans même lui jeter un dernier coup d’œil, il repartit en direction de la porte.. Vers le néant d’où il était venu.

Dans la voiture qui emmenait Helena à la prison du tribunal, le silence régnait. La jeune femme savait qu’il ne servait à rien de se justifier auprès des 3 hommes qui l’accompagnaient. Ceux ci ne l’écouteraient pas, leurs ordres étaient de la conduire auprès du juge, et rien ne devait les en empêcher, aucun des artifices qu’elle pourrait utiliser pour les faire plier ne marcherait.  Ils étaient prêts a user de leur armes pour la faire taire.

Un peu plus tard, Helena était assisse sur le petit banc de sa cellule. Ses gardes l’avaient emmené jusque là et l’avaient laissé seule. La cellule était petite, grise et sale, pour tout meuble un banc et une paillasse jetée sur le sol, signe que cet endroit ne serait pour elle qu’un passage…

Helena regardait les murs qui étrangement semblaient se rapprocher d’elle, elle ferma les yeux, prise d’un vertige et laissa son esprit dériver. Elle se revit cinq mois plus tôt, avant que tout ne commence, avant que sa vie ne bascule, avant qu’elle ne devienne une fugitive…

Elle vivait alors dans le quartier résidentiel de NewPaïs, un quartier ordinaire, calme, tranquille. Derrière ses yeux clos, elle revoyait sa petite maison, si semblable aux autres habitations de la rue, et en même temps si différente. La petite barrière de bois blanc, les volets bleus décorés de fleurs lui donnaient un air printanier en toute saison. Helena sourit en y repensant, elle avait toujours aimé s’entourer de couleurs depuis sa plus tendre enfance. Cela lui avait d’ailleurs attiré bien des remarques et, petit à petit, les gens autour d’elle s’étaient habitués à ce qu’ils appelaient « ses bizarreries ».

L’intérieur de sa maison était tout aussi coloré, des tapis, des coussins qu’elle avait elle-même confectionné, assemblant des bouts de tissus trouvés au hasard de ses promenades, sur les murs des tableaux qu’elle avait peint elle-même, jetant de la couleur sur la toile comme certains jettent de l’eau sur un mur pour le laver. Helena lavait le blanc de sa vie, lavait la tristesse de ses murs à l’aide de sa peinture. Son mari la regardait parfois avec inquiétude, mais lui aussi avait fini par s’habituer. Il avait su dès le jour ou il l’avait rencontré pour leur mariage qu’il allait au devant des difficultés avec cette femme, c’était d’ailleurs pour cette raison que l’Administration les avait appariés, pensant que lui par son sérieux pourrait la ramener dans le droit chemin. Il y avait presque réussit, gommant la plupart de ses extravagances, sans toutefois arriver à les effacer toutes. Il n’avait qu’une peur, c’est qu’un jour une de ces excentricités finisse par lui attirer des ennuis, lui retirant tout ce que son labeur lui avait apporté au fil des années.

Sur son banc, Helena soupira et sourit.

« Tu es enfin débarrassé de moi Paul, murmura t’elle. Et sans soucis pour toi… »

Elle ouvrit un instant les yeux, et les referma bien vite tant la laideur des murs blanchâtres la faisait tressaillir. Elle replongea dans ses souvenirs, dans les couleurs de sa vie.

Elle revoyait le jour ou elle le rencontra, cet homme qui transforma sa morne existence. Cela se passait il y a cinq mois, lors de la promenade obligatoire dans le parc près de sa rue. Leurs regards se croisèrent, un instant, une seconde d’éternité. L’espace d’un moment elle se retrouva ailleurs, dans un monde ou la couleur était primordiale. Elle sentit en elle le printemps renaître, le soleil s’embraser. Mille parfums, mille couleurs l’environnèrent. Le bras de son mari  la tirant pour qu’elle continua d’avancer la ramena à la réalité. Elle trébucha, se rattrapa de justesse et repris sa route sous les murmures indignés de Paul. Interrompre la promenade, ce rite quotidien, inlassablement répété n’était pas pensable. Elle continua donc de marcher, dans un état second, se laissant guider par son mari qui la sentant troublée prit sur lui d’accélérer le pas pour la ramener chez eux au plus vite.

Là, nulle question, l’incident semblait oublié pour Paul, comme effacé. Mais Helena gardait en sa mémoire et en son cœur l’éclat de ces yeux qui l’avaient touché au plus profond de son âme. Petit à petit sa vie tranquille repris, mais régulièrement elle guettait, attendant l’instant où le miracle se reproduirait. Et il revins…

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