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Mots, et maux, émotions
16 décembre 2009

Folie ordinaire

Je n'avais dit a la comtesse de Greby que l'exacte vérité. Je n'étais pas né dans la folie, je m'y étais invité. Un soir de printemps j'étais entré en elle, la voyant la désirant je l'avais trouvé belle,cette folie si délirante qui m'avais fait prendre une vieille dame autoritaire et étrange pour un irrésistible ange.

M'enfonçant de plus en plus en mon délire, j'avais entouré la comtesse de mon charme. Je la voulais séduite, a ma merci, sans arme. Et, au moment ou elle allait succomber, oubliant son age  son mari décédé, je fus pris d'une rage et sauvagement l'étranglais. Et c'est a son cadavre qu'enfin expliquait la raison de ma démence qui, sans le moindre remord m'avait aidé a la conduire ici au jour de sa mort.

Se souviendrait elle cette vieille aristocrate, si fière de son rang, de son sang, de sa race, se souviendrait elle de l'homme qui l'a tué, elle qui ne pouvait souffrir ceux qui n'étaient point nés...

Lancé dans ma démence comme un train sur des rails, je fis quelques pas de danse et franchit le portail.

La folie ne me quittait plus, mon envie de meurtre ne s'était pas tue. Je cherchais d'autres victimes a lui offrir, d'autres moments dont elle savourerait le plaisir. Je n'étais plus seul sur les chemins, elle était là compagne de chaque instant, promesse de soutien.

Je cueillais sur mes lèvres le dernier souffle d'une bourgeoise naïve qui pensait avoir trouver en moi une distraction a sa vie oisive.

Se souviendrait elle cette femme aisée, si fière de son appartement et de son parc paysagé, se  souviendrait elle de l'homme qui l'a tué, elle qui n'avait qu'une peur : être ruinée...

Une catin fut la suivante, qui mourut en me jetant un regard d'amante, peut être heureuse de voir la fin de cette vie qui ne menait a rien.

Se souviendrait elle cette fille perdue, si triste quand elle arpentait les rues, se souviendrait elle de l'homme qui l'a tué, elle qui donnait son corps a ceux qui la payait.

Une jeune fille attira mon attention, fleur a peine éclose et déjà en perdition. Elle était belle, elle était frêle, j'offris a ma démence la demoiselle.

Se souviendrait elle cette douce enfant, si fragile si emplie de tourments, se souviendrait elle de l'homme qui l'a tué, elle qui était a peine sortie de son nid douillet.

Mais ma folie n'était pas satisfaite, de suite je dut repartir en quête, la mort était dans mon sillage, mon délire comme unique paysage.

A bout de souffle, a bout de meurtres, je m'arrêtai, comprenant enfin ou ma démence m'avait amené. Elle me voulait a elle sans artifice, elle attendait de moi l'ultime sacrifice. Jalouse de la vie qui me tenait le corps, elle désirait que je vienne a elle en me donnant la mort.

Debout sur la  falaise ou mes pas m'avaient conduis, je levai les yeux vers le soleil qui d'un coup m'éblouis. Je mit  les bras en croix et dans le vide me jetai, allant unir mon esprit a celle qui m'attendait.

Me souviendrais je, moi l'homme sans vie, si indifférent aux meurtres que j'avais commis, me souviendrais je de la démence qui m'avait poussé a la rejoindre en enfer pour l'éternité?

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